Le 24 novembre, un ami m’a invité à un « show de métal ». Pourquoi pas? Je me disais qu’il allait peut-être y avoir du stoner metal, des mosh pits et d’autres choses sympathico-agréables du genre. Tout ça dans une ancienne église transformée en salle de spectacle! Entre ça et passer un vendredi soir à faire de la photosynthèse devant mon écran d’ordinateur… À vrai dire, une fois sur place, je n’ai pas fait le lien et j’ai passé les premières heures à boire et fumer dehors en bonne compagnie.
Cette soirée là… :
Plot twist! Devine quoi? Le « show », c’était la Messe des Morts. Le même festival de black metal organisé par Sepulchral Productions qui avait invité le groupe NSBM (national socialist black metal) Graveland l’année passée. Le concert avait été annulé suite à la mobilisation d’environ 150 personnes et l’obstruction du Théâtre Plaza. Rien de moins pour les organisateurs du festival qui se vantent de « satisfaire ceux qui aiment leur Metal sombre et haineux »1.
Quand je suis finalement rentré dans le Théâtre Paradoxe pour squatter la prestation du headliner de la soirée, j’ai enfin pigé : dans la foule d’environ 450 personnes, il y avait une bonne quarantaine de boneheads. Pour que ça soit clair et limpide, un skinhead néo-nazi, ça n’a rien à voir avec ton vieux « mononcle » raciste. Ton Réjean nationaleux en question, il n’assume pas ses opinions publiquement et ne les exhibe pas au travers de symboles nazis. Un bonehead, ce n’est pas le genre de personne avec qui tu peux essayer d’avoir une discussion éducative et constructive – c’est le type que tu vas voir si tu as besoin d’un bon facelift.
D’ailleurs, c’était la première fois que j’étais entouré de fascistes assumés dans un contexte hors-manifestation. En me baladant dans la foule, j’apercevais des variantes de l’aigle impérial du troisième Reich, des Totenkopf (l’insigne d’unité d’une division des SS) platement agencées au drapeau québécois, la quinzième rune du Futhark et d’autres apparats symboliques de la mouvance néo-nazie.
Sur la scène, le band réalise sa performance avec pour décoration deux tiges ornées de têtes de porc (des vraies, j’ai vérifié). Pas trop surprenant pour Nargaroth, un groupe maintes fois dénoncé pour ses affiliations crypto-nazies, fascistes, racistes et antisémites (je laisse au lecteur la liberté de faire ses propres recherches). Entre deux prestations, René « Kanwulf » Wagner (le chanteur du groupe) se saisit d’une des têtes de cochon en la brandissant vers la foule et, postillons au rendez-vous, beugle « this is the antifa! ».
Confus entre les applaudissements, quelques saluts nazis et ma propre paranoïa, je me suis barré.
Maux de tête du lendemain :
Du passage de Nargaroth à Montréal jusqu’à la manifestation « Alerte anti-raciste » du 25 novembre à Québec (qui s’est soldée par le spectacle déambulatoire d’Atalante Québec, de Storm Alliance, de la Meute, de la Milice du III% et d’autres groupes), les mouvements d’extrême droite sont en essor ici et ailleurs.
Si la mobilisation de Québec semble avoir éclipsé la venue d’un groupe fascisant à Montréal, force est de constater que la scène black metal, et plus spécifiquement la Messe des Morts, reste particulièrement problématique. Est-elle devenue un safe space néo-nazi ou encore est-elle le lieu d’une masse critique d’extrême droite gangrenant un espace musical et contre-culturel supposément apolitique? Comment sensibiliser ceux et celles qui déprécient les postures haineuses de leur scène musicale sans les aliéner à notre propre mouvement, et ce à travers l’action?
À mon sens, une chose est sûre : si les adeptes du black metal ne s’occupent pas eux-mêmes et elles-mêmes d’exclure et de marginaliser la constellation fasciste et crypto-fasciste qui s’y développe, d’autres s’en chargeront.
On se voit au prochain « show ».
Solidarité avec les arrêté.e.s du 25 novembre.
Collaboration spéciale anonyme
« À mon sens, une chose est sûre : si les adeptes du black metal ne s’occupent pas eux-mêmes et elles-mêmes d’exclure et de marginaliser la constellation fasciste et crypto-fasciste qui s’y développe, d’autres s’en chargeront.
On se voit au prochain « show ». »
C’est lourd, votre avertissement. Dites-vous que ce sont les braves qui ont fait annuler le show de l’an passé qui ont poussé des centaines de fans de black metal à haïr tout concept d’anti-fascisme, voir carrément à l’extrême-droite. Continuez comme ça, vous aidez tellement la cause du combat contre le fascisme…
« C’est les anti-faciste qui font annuler des show de néo-nazi qui nous poussent à être encore plus des néo-nazis ».
Assumes que t’es un esti de crétin, c’est pas les anti-facho qui te rendent raciste, c’est parce-que t’es raciste. Réveille
La page Wikipedia en anglais et en français de Nargaroth a été modifiée pour relater ces événements. Les promoteurs à l’avenir ne pourront plus se laver les mains quant à leur ignorance des liens entre Wagner et l’extrême droite.
Déjà que de beugler “Black metal ist krieg” 53 fois dans une chansons, c’est suspect…